Timbre : Georges ROUAULT
Timbre : Georges ROUAULT : Ce timbre-poste de la scène artistique 1971 est émis l'année du centenaire d'un des créateurs les plus originaux de ce temps, Georges Rouault (1871-1958). Il était né dans une cave de Paris pendant la Commune et n'était pas sans voir là une prédestination à la tension tragique de son œuvre. Entré chez un restaurateur de vitraux, « la couleur, écrira-t-il, grisa l'apprenti verrier». Aux Beaux-Arts, il est l'élève préféré de Gustave Moreau, puis fréquente les écrivains catholiques, Huysmans, le philosophe Maritain et surtout le polémiste Léon Bloy, dont il fut l'intime, sans se laisser pour cela appeler le Léon Bloy de la peinture. Ses œuvres, à la composition dramatique, aux couleurs intenses soutenues par une matière fournie, s'expliquent sans doute par l'expérience du peintre verrier, par l'amour de l'art roman, ascétique et hiératique. Mais l'expression est partie d'une vision toute animée d'intention morale, d'une inspiration profondément religieuse, dans la ligne du christianisme des origines. Et son tempérament spontané, sa rude bonté, sa franchise de cœur, lui font trouver les chemins de l'expressionnisme le plus direct. A côté des sujets bibliques, sa vision se nourrit du spectacle de la société de son temps, dans les êtres qui en constituent la frange la plus marquée, les familiers des tribunaux, le monde du cirque. Réagissant ainsi contre l'optimisme de la Belle Époque, il grave à gros traits la déchéance, l'angoisse de l'humanité. S'il proteste qu'il n'a « jamais voulu le scandale, ni désiré choquer ou blesser autrui », ses noirs accentués, ses couleurs profondes usent des prolongements émotifs de la sensation pour troubler les quiétudes béates et provoquer à la méditation essentielle. Cette tête de clown achevée en 1946, qui est au Musée national d'Art moderne, est intitulée Songe creux. Rouault, d'après ses intimes, « ne donnait un titre à ses peintures qu'après les avoir achevées» : c'est donc une indication précieuse sur l'intention finale de l' œuvre. Ce masque fascinant, énigmatique semble suivre une chimère, se poser vaguement une question, fixer le néant, penser à vide. Le peintre nous tend-il une sorte de miroir, où nous sommes confrontés avec notre vaine image, notre hébétude, notre incapacité à nous poser seulement les vraies questions? Cette sincérité, Rouault l'a eue envers lui-même. « J'ai vu clairement, écrit-il au critique Édouard Schuré, que le pitre, c'était moi, c'était nous ... Cet habit riche et pailleté, c'est la vie qui nous le donne. Mais si l'on nous surprend comme j'ai surpris le pitre, qui osera dire qu'il n'est pas pris jusqu'au fond des entrailles d'une incommensurable pitié? J'ai le défaut de ne laisser jamais à personne son habit pailleté : l'homme que j'ai devant moi, c'est son âme que je veux voir; et plus il est grand, plus je crains pour son âme ... »
Année : 1971
Yvert & Tellier n° 1673
Categorie : Timbres poste
Famille : peintres / sculpteur…
Dessinateur : Robert Cami
Valeur neuf MNH ** : 0.20 €
Valeur oblitéré : 0.10 €